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Serge Baguidy-Gilbert : Préface du recueil « Le mal dans sa Divinité »

SergeBaguidy-Gilbert_675x900Je vous présente la préface de mon recueil de poésie « Le mal dans sa Divinité ».  Je suis très honorée que cette préface est été réalisée par Serge Baguidy-Gilbert, auteur du recueil de poésie « Elliptiques » publié aux Éditions Dédicaces:

Que volà un titre d’oeuvre poétique pour le moins audacieux! Cela prend un certain courage pour associer ces deux termes (mal et divinité), quasi antinomiques dans notre société judéo-chrétienne. Une telle association pourrait facilement relever du scandale dans l’esprit de plusieurs. Et pourtant, c’est le titre qu’a choisi Francine Minville, poétesse de la lignée des Lautréamont et William Blake par les thèmes qu’elle traite, pour son deuxième opus poétique.

Déjà, dans le champ littéraire québécois, l’œuvre de Francine Minville trace et creuse un sillon particulier. Il s’agit d’une œuvre que j’oserais qualifier d’initiatique en ce sens qu’elle nous introduit, poème après poème, à un autre monde, à une dimension intérieure plus sombre, presque interdite, qu’elle nous ouvre une porte sur un espace vertigineux habité par une certaine démence:

Il en tient à ceux qui voient au-delà de la vérité
Dans la profondeur de l’encre sur des écrits fondés
Qui attendent le mot d’ordre pour se déployer

Comme dans son précédent recueil, Francine Minville prend fait et cause contre les souffrances humaines et appelle à « rendre justice selon nos lois / Envers et contre tous ». Mais la poétesse se bute à une certaine fatalité. C’est ce qui lui fait lancer ce cri : «Laissez-moi mourir».

Penser, sans pouvoir exprimer ce qui explose dans ma tête
Car mes lèvres resteront closes à tout jamais

La poésie de Francine Minville est obscure, sombre mais attentive aussi à la vie puisque comme le dit si bien Hélène Ouvrard, « au fond, tout le mystère de la poésie est d’être attentif au monde ». Dans l’œuvre de Francine Minville, on sent passer le souffle puissant des détresses qui s’acharnent sur les êtres humains, des mensonges qu’on leur fait gober en retour d’une piteuse espérance. Alors on y entend gronder, de temps à autre, une immense révolte qui la fait invoquer celui qu’elle nomme « Lucem Ferre ».

Ravalez vos paroles et jetez-les aux ruines
Avec les rats et la vermine

L’auteure nous fait descendre avec elle dans ce qu’elle appelle ses «lieux amers» pour nous ramener quelques vers plus tard « de la terre des hommes à celle des clones ». La poésie de Francine Minville est une poésie de douleur qui, comme le dit si bien Christian Bobin, fait éclater le cœur « en silence et puis plus rien, presque rien : des lettres qui font des mots qui s’avancent, des phrases qui s’enfoncent et se perdent dans le matin d’hiver ».

Je vous invite à la rencontre d’une auteure malgré tout lumineuse, de cette lumière qui finit par jaillir du plus profond de la souffrance et des ténèbres.

Serge Baguidy-Gilbert, m.a.Th